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Leur société
Quand la guerre Jospin-Chirac passe par la Palestine
«Jospin dans la tourmente » (Le Parisien), « Les 3 jours qui ébranlèrent Jospin » (Libération), « Tempête et confusion » (L'Humanite), des pages dans les quotidiens durant plusieurs jours, une avalanche de commentaires sur toutes les chaînes télés et radios... L'affaire serait de taille. Mais de quoi s'agit-il donc?
Visitant Israël, Jospin a qualifié de « terroriste » le combat du Hezbollah libanais contre l'occupation du Sud-Liban par l'armée israélienne, tout en dédouanant cette dernière. Et cela n'a rien de surprenant de sa part.
Depuis 22 ans que Tsahal, l'armée d'Israël, a envahi le Sud-Liban, les Etats occidentaux, et la France comme les autres, n'ontjamais vraiment contesté à l'Etat israélien le droit d'y imposer sa loi. Même chose quant aux territoires palestiniens et syriens qu'Israël occupe militairement depuis 1967. Les puissances mpérialistes (dont la France, et que e soit la droite ou la gauche qui gouverne), n'ont jamais rien tenté pour obliger Israël à respecter les multiples résolutions de l'ONU condamnant son occupation, et encore moins es droits des peuples arabes de la région.
La chose est si notoire que les joumalistes couvrant le séjour de Jospin n'avaient même pas relevé ses propos. Ils ne l'ont fait que le surlendemain, quand des étudiants ,ont accueilli à coups de pierres sur le campus palestinien de Bir-Zeit. on parle maintenant de la «gaffe» du Premier ministre qui, en effet, n'avait peut-être pas prévu l'ampleur des réactions dans les pays arabes.
Reste que Chirac avait été Critiqué par Israël lors d'un récent voyage à Jérusalem où il avait fait mine de se préoccuper 'du sort des Palestiniens. Jospin ne pouvait faire moins que d'y aller de sa petite phrase, quitte à susciter, à son tour, son propre incident en prenant ouvertement parti pour Israël. Comme pas grand-chose ne différencie Jospin de Chirac sur le plan social et politique et que le premier ambitionne de remplacer le second, il leur faut bien tenter de se démarquer d'ici à la prochaine élection présidentielle. Et à défaut d'avoir les moyens ou la volonté d'agir sur la situation au Proche-Orient, les hommes politiques français peuvent encore l'utiliser pour mener leur propre guerre les uns contre les autres.
Cette comédie pitoyable ferait sourire si elle ne se déroulait pas sur fond d'un drame réel, celui d'une population palestinienne opprimée depuis des décennies par Israël, celui aussi de la population israélienne enfermée dans un état de guerre permanent avec ses voisins du fait de la politique chauvine de ses dirigeants. De cela, Chirac et Jospin n'ont que faire et ils en sont les complices.
Quand Chirac évoque l'« irresponsabilité » de Jospin vis-à-vis d'une prétendue «politique de la France » au Proche-Orient il se paye de mots. Car, quelles que soient les circonlocutions dont les hommes politiques fi-ançais habillent leur prétention à représenter une « grande puissance », l'impérialisme fi-ançais n'est que la cinquième roue du carrosse dans la région.
Les véritables acteurs de la situation, ce sont les Palestiniens avec les pierres de lIntifadaï Israël avec ses canons et les Etats-Unis avec leurs puissances économiques, financière et politique. Face à eux, l'Etat français n'est, au mieux, qu'un figurant, sinon un clown dérisoire.
Si, à croire les titres des journaux, une « tempête » a été soulevée par les péripéties de la cohabitation Chirac-Jospin, elle est restée confinée à un verre d'eau. Quant à la «carafe » de Jospin, décoiffée par un caillou à Bir-Zeit, cela fait partie des risques du métier de politicien, mais c'est surtout un rappel de ce que la « guerre des pierres » a plus fait que toutes les résolutions de l'ONU - sans parler des prétentions de Jospin ou Chirac - pour forcer Israël à faire quelques concessions aux revendications palestiniennes.