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Argentine : La bourgeoisie espagnole inquiète pour ses profits
En Espagne, toute la classe politique s'est beaucoup affairée pendant ces semaines face à la crise grave que connaît l'Argentine. Du dirigeant socialiste Felipe Gonzalez à l'actuel président de droite Aznar, on a multiplié les contacts, qui avec l'éphémère président argentin De la Rua, qui avec son prédécesseur péroniste, Carlos Menem. Et tous les dirigeants politiques espagnols d'affirmer leur solidarité avec le peuple argentin. Tout ce beau monde a hypocritement invoqué les liens culturels et sociaux qui unissent l'Espagne et cette ancienne colonie vers laquelle tant d'Espagnols ont émigré. Mais l'inquiétude vient plus sordidement de la crainte de voir diverses grandes sociétés espagnoles subir les contrecoups de cette crise économique, sociale et politique qui n'en finit pas de rebondir.
En effet, dans les années 1990, ce sont des milliers de millions de pesetas qui ont été investies par des sociétés espagnoles dans les entreprises privatisées du temps du président péroniste d'alors Carlos Menem.
La vague de privatisations que les péronistes au pouvoir dans cette dernière décennie ont réalisée, essentiellement parce qu'ils avaient besoin d'argent pour payer la dette, s'est faite en grande partie au profit de sociétés espagnoles. Celles-ci ont ainsi mis la main sur la plupart des industries de base de l'économie argentine. L'électricité, la téléphonie, le pétrole, les lignes aériennes et les banques ont été acquises à bas prix par des sociétés espagnoles. Et les investisseurs espagnols ont réalisé des opérations d'autant plus intéressantes que le cours des actions de ces entreprises industrielles argentines a d'autant plus vite augmenté qu'elles ont affiché de plantureux profits. En tête du palmarès des profiteurs de cette mainmise sur l'industrie argentine, on trouve la Telefonica qui a racheté l'entreprise nationale argentine de téléphonie et a réalisé 15,5 % de ses profits dans ce pays au cours des dix dernières années. On trouve aussi Repsol, la multinationale espagnole du pétrole qui a acheté YPF, ce qui a assuré 53 % de ses bénéfices. C'est aussi l'entreprise électrique espagnole ENDESA qui a racheté EDESUR. Citons encore les banques espagnoles de Santander et de Bilbao Vizcaya qui ont racheté à bas prix des banques argentines. Ou l'affaire de la compagnie Aerolineas argentine qui, après sont rachat par une société étatique espagnole, a été fermée puis revendue à la société de transport aérien Air Comet.
La bourgeoisie espagnole qui est devenue le second investisseur en Argentine, laissant la première place aux Etats-Unis, ne cache pas son inquiétude devant les conséquences d'une crise qu'aucun dirigeant argentin ne semble maîtriser. Elle voudrait que la classe ouvrière argentine qui a fait les frais de la politique de privatisation menée par ses dirigeants continuent d'accepter les licenciements et le chômage, les bas salaires, le recul dramatique de tous les services publics. Elle voudrait continuer à prospérer sur le dos du peuple argentin.