POUR LES PETITS PARTIS, REDOUBLER D’EFFORTS POUR SE FAIRE ENTENDRE07/06/20242024Presse/medias/articlepresse/images/2024/06/Mediacoop2.jpg.420x236_q85_box-92%2C0%2C1440%2C759_crop_detail.jpg

Article de presse

EUROPÉENNES

POUR LES PETITS PARTIS, REDOUBLER D’EFFORTS POUR SE FAIRE ENTENDRE

Illustration - POUR LES PETITS PARTIS, REDOUBLER D’EFFORTS POUR SE FAIRE ENTENDRE

Hier soir, la tête de liste Lutte ouvrière aux européennes Nathalie Arthaud donnait un meeting à Clermont-Ferrand. L’occasion pour nous d’échanger avec les militants à propos d’une campagne dominée par les sondages, les grands partis et leurs idées.

Mardi 4 juin. Sur France 2, les 8 principales têtes de liste de l’élection européenne débattent en prime time. Au moment où les joutes verbales se terminent, 8 autres candidats sont équipés. Ils débattront aussi. Entre eux. Comme si les élections comptaient une ligue 1 et une ligue 2. Les chefs de fil des petits partis le savent : leur audience sera moindre. Bien moindre. Surtout qu’on est en retard. Les journalistes ont passé trop de temps avec les candidats « principaux ».

Cette soirée dit beaucoup de la campagne. Des campagnes en général. Tel est l’apanage des petits partis. La seconde zone. La ligue 2 de la couverture médiatique. Alors quand on est un petit parti justement, comment fait-on pour exister malgré tout ? Nous sommes allés le demander à des militants LO, hier soir, au nord de Clermont.

Maison du Gospel
Macron est partout. Il s’accapare le micro. Au détriment même du temps de parole de sa candidate Renaissance aux européennes Valérie Hayer. Mais le président n’est pas le seul homme à parler à la place de la candidate puisque le premier ministre Gabriel Attal s’invitait également « par surprise » lors d’une des prises de parole de la tête de liste il y a quelques jours. Tous les arguments sont bons pour squatter l’espace médiatique en période d’élection.

Elle, ne parle que pour elle-même et personne ne parle à sa place. Nathalie Arthaud, habituée des scrutins, tête de liste Lutte ouvrière, était présente hier soir, à partir de 18h30 à la Maison du Gospel de Clermont-Ferrand pour un meeting qui a rassemblé près d’une centaine de personnes.

Sur le petit parking du bâtiment, quelques personnes finissent leur cigarette. Le meeting va commencer. Trois chaises. Une pour Nathalie Arthaud, une autre pour Marie Savre, locale de l’étape et candidate sur la liste LO puis une dernière pour Dominique Leclair, militant LO et ouvrier Michelin. Les trois orateurs sont entourés de grands drapeaux rouges et font face au public.

Ce soir-là, Médiacoop mais aussi France 3 Auvergne et La Montagne. Presque un carton plein à Clermont. En général, il est autrement plus compliqué de trouver des relais. « De toute façon, on ne compte pas sur les médias particulièrement », lance Cédric, jeune militant, d’un air résigné. Nous parlons avec des militants de tous âges. Tous dépeignent la même situation et expliquent avoir la même solution.

Investissement militant
Hier soir, à peu près au moment où Natahlie Arthaud prenait la parole à Clermont, Emmanuel Macron était invité ou plutôt s’est invité dans les JT de TF1 et France 2, à la veille de la fin officielle de la campagne des européennes. Sous couvert de la célébration du 80ème anniversaire du débarquement le 6 juin 1944, il s’octroie un temps de parole bienvenu pour booster la campagne de Valérie Hayer, tête de liste Renaissance. 9 millions de français regardent alors les deux JT. L’arcom est saisie juste après par des membres de grands partis.  Lundi matin, plusieurs candidats étaient déjà reçus par l’Autorité de régulation de l’audiovisuel pour demander un changement des règles en matière de temps de parole.

Alors pour compenser le manque de couverture des plus petits partis, ces derniers comptent sur l’engagement militant. « Ce qu’on fait de bien, c’est aller devant les entreprises », indique Cédric. « C’est un travail de tous les jours. Sur les marchés, au travail, avec tes voisins. C’est normal qui parlent moins de nous, on dérange dans leur système », abonde quant à lui Dominique Leclair. « Ça se passe bien quand on parle aux gens. On n’est pas très connus donc c’est la présence militante qui compte. On est très présents même hors élection », confirme un autre jeune militant, Mattéo.

Se rendre visible est un enjeu. Faire entendre ses idées en est un autre. Pas une tâche facile lorsque les grands partis dominent, relayés par les médias, et que l’extrême-droite fait son nid, dictant les sujets légitimes à être traités, et poussant les autres candidats à empiéter sur ses plates-bandes pour rester dans la course.

Pas de côté
« Voter extrême-droite, c’est voter pour son futur exploiteur, pour son licencieur. C’est voter contre ses propres intérêts. Ce RN dont l’électorat devient plus populaire, il faut dire aux gens qu’ils se trompent d’ennemi », s’est insurgée Nathalie Arthaud hier soir.

Cette dernière n’a pas parlé des étrangers, de grand remplacement et d’insécurité. Elle a parlé du salaire de Carlos Tavares, patron de Stellantis, groupe issu de la fusion de PSA et Fiat. Pour son travail accompli l’année dernière, il a gagné l’équivalent de 1586 années de ce que touche un intérimaire qui travaille à la chaine dans l’une des usines françaises de son groupe. 36,5 millions d’euros. Puis elle a mentionné cette femme de ménage de la gare Montparnasse, licenciée pour avoir gardé 1€ de pourboire lorsqu’elle surveillait les toilettes. Elle a parlé des hommes et des femmes qui galèrent. Des quartiers populaires. Elle rappelle que ces jours-ci, il a fait 49°C à New Delhi. Que les tranchées sont de retour en Europe avec la guerre en Ukraine. Elle parle de l’oppression du peuple Kanak en Nouvelle-Calédonie.

Puis de l’extrême-droite. Pour redire ses idées nauséabondes. Pour dire aux gens qu’il ne faut pas se tromper d’ennemi. Pour rappeler que les sujets qu’elle impose comme incontournables ne le sont pas et qu’il faut aussi s’attacher à parler des travailleurs et des travailleuses, du pouvoir d’achat, de la paix et du climat. Et surtout d’Europe alors que Bardella s’attache à nationaliser au maximum le débat. L’Europe. En 2023, ce sont au moins 3000 personnes qui ont perdu la vie en Méditerranée pour la rejoindre.

Système D
Au total, il n’y a pas 8 listes mais 38. Marie Savre met les militants et sympathisants en garde. Elle les appelle à prévenir le parti si des bulletins LO venaient à manquer le jour J. Ce sont des choses qui arrivent. Cette vigilance, c’est le système D. Le même qui aide à financer les campagnes. En effet, le coût est aussi souvent un obstacle pour les petits partis. Alors que l’impression des affiches ou des professions de foi n’est souvent qu’une formalité pour les groupes traditionnels, il faut jouer la carte du système D ou du bon marché pour les autres.

Le vote sera dimanche. De l’aveu des militants, ne pas gagner n’est pas grave. L’essentiel est de parler partout des idées de LO, faire avancer le vote et réveiller les travailleuses et travailleurs pour qu’ils se fédèrent pour un monde meilleur.
 
ANTOINE LEGRAND

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